Interview d’une enseignante sur le stress chez les enfants en maternelle
Bonjour Mme Janeiro,
Vous êtes enseignante en classe de petite et moyenne section, vous exercez depuis 11 années en zone rep+ (rep renforcé).
Les enfants en maternelle expriment-ils des symptômes de stress à l’école ?
- Oui, nous en avons tous les jours !
À tout âge et dans toutes les classes ?
- Oui, je pense. Au cours de mes 11 années d’enseignement, j’ai vu des réactions de stress se manifester tous les ans !
À tout moment de l’année et de la journée, ou observez-vous des moments plus intenses que d’autres ?
- Tout le temps, les réactions sont cependant plus nombreuses lorsqu’on rajoute le facteur « fatigue » (fin de journée ou de semaine).
C’est du stress lié au scolaire ou à d’autres enjeux ?
- Les deux, selon les situations familiales, selon la situation de la classe, face aux apprentissages...
Quelles expressions de stress rencontrez-vous le plus souvent ?
- En maternelle, je dirai le mutisme ou les pleurs ! Selon la situation de stress, ils se taisent ou ils explosent en sanglots. Dans les deux cas, il est très difficile de passer à autre chose...
Y a-t-il des classes plus fréquemment exposées au stress ?
- Je ne pense pas, il y a tellement de facteurs de stress différents selon les enfants. Peut-être l'entrée en petite section et encore cela dépend vraiment des enfants et de la préparation des parents. Tous les ans, moi-même je stresse avant la rentrée !
Quels impacts de ce stress observez-vous sur les apprentissages et sur la socialisation des enfants ?
- Les enfants en situation de stress ou d’angoisse n’entrent pas dans les apprentissages, ils sont constamment préoccupés par la cause du stress… Tant que cette source de stress n’est pas apprivoisée, on aura du mal à travailler avec cet enfant.
- Cela joue aussi sur la socialisation car cet enfant va se mettre à l’écart* pour se rassurer et ne pas construire de relation avec les camarades de classe.
Avez-vous des outils particuliers pour repérer le stress et pour les aider à le surmonter ? Si oui, lesquels ?
- Je n’ai pas « d’outils » pour les repérer ou les aider, je joue beaucoup sur l’humour pour dédramatiser la situation stressante… en essayant de les faire passer à autre chose afin de surmonter le moment…
- Depuis quelques années, je joue plus à des jeux de société en classe, cela permet de découvrir les enfants par un autre biais, des situations peuvent se débloquer en jouant.
- Quand le sujet d’angoisse ne peut être enlevé (comme un autre élève ou une peur de l’école) je laisse du temps en expliquant le plus souvent les choses. Et on autorise les moments de repli pour l’enfant stressé, on « sécurise ».
Merci !
Note de notre psychologue :
La mise à l’écart peut se faire dans les deux sens, selon l’expression du stress : - Si l’enfant exprime son stress par de l’inhibition, il se mettra lui-même à l’écart, par un mécanisme de repli sur soi, qui nourrit la dévalorisation et le sentiment de rejet. - Si l’enfant exprime son stress par de l’agitation ou de l’agressivité, il sera mis par les autres à l’écart, il se protégera parfois par cet effet repoussoir inconscient, mais il se mettra aussi en difficultés sociales, affectives et narcissiques (image et estime de soi). Dans les deux cas, nous vous invitons à mesurer sa charge de stress.